Chirurgie oncologique en ambulatoire: convaincre les chirurgiens, plus que les patients.
Par François BOISSIER, au congrès de I'AFC, PARIS, 3 octobre 2014.

Pour que la chirurgie ambulatoire se développe dans le domaine de la chirurgie oncologique, il est nécessaire de former et d'informer les chirurgiens afin de les convaincre de l'intérêt de cette pratique, ont souligné des spécialistes vendredi au congrès de l'Association frança ise de chirurgie (AFC) à Paris.

Lors de cette session du congrès annuel de chirurgie, il a bien sûr été rappelé que la clé du passage d'un certain nombre d'actes de chirurgie à l'ambulatoire plutôt que de continuer à les faire en hospitalisation complète, est l'organisation et la coordination.

Cela n'est pas toujours simple quand, pour la chirurgie du sein par exemple, il faut coordonner les activités du radiologu e, du médecin nucléaire, de l'anesthésiste, du chirurgien, du pathologiste, du biologiste, voire du radiothérapeute en cas d'irradiation per-opératoire !

Mais aussi, clairement, "il faut changer les mentalités des chirurgiens", a souligné Hélène Charitansky de l'Institut universitaire du cancer de Toulouse (IUCT). Alors qu'auparavant, l'organisation était centrée sur le planning des chirurgiens, désormais toute l'organisation "tourne autour du patient" afin que tout son parcours de soins puisse être fait en une journée.

Dans l'unité de chirurgie ambulatoire dont elle est responsable, au sein de cette nouvelle structure née du regroupement de l'Institut Claudius-Régaud et de la cancérologie du CHU, une disparité dans les pratiques est observée. Alors que pour les chirurgiens du centre anticancéreux, qui possédait déjà une unité d'ambulatoire depuis
2010, 63% des actes éligibles sont faits en ambulatoire, pour les chirurgiens venant du CHU, moins habitués, pour le moment 25% des actes éligibles sont réalisés en ambulatoire.

"Les chirurgiens sont insuffisamment formés, et informés" et il y a donc un travail important à faire à ce niveau pour faire évoluer les pratiques.

C'est d'autant plus nécessaire que dans ce nouvel institut, les 50 lits traditionnels sont jugés "insuffisants" au regard de l' activité de chirurgie, et l'unité d'ambulatoire de 10 places actuellement (15 sont prévues à terme) doit impérativement augmenter son activité.

François Dravet, pionnier de la chirurgie ambulatoire en cancérologie au centre RenéGauducheau à Nantes, a indiqué que dans son centre, si tous les chirurgiens ont le même pourcentage de chirurgies du sein avec geste axillaire réalisées en ambulatoire, en revanche pour les chirurgies avec un geste de reconstruction, ses collègues avaient un pourcentage inférieur au sien. C'est pourquoi il a réuni tous les chirurgiens concernés fin 2013 pour insister sur ce point, et depuis la réalisation de cet acte en ambulatoire a augmenté.

Ainsi, même dans ce centre ayant déjà une pratique élevée d'ambulatoire, "il ne faut pas se reposer sur ses lauriers et régulièrement informer", a-t-il estimé.

Pour un autre spécialiste présent lors de cette session, "mettre les patients en ambulatoire devrait être le standard et l'hospitalisation une dérogation".

Un autre a estimé que vis-à-vis des patients, "il faut changer notre discours en consultation et dire d'office que cet acte est faisable en ambulatoire". Parfois le chirurgien s'autocensure en n'évoquant pas cette possibilité, par exemple parce que le patient habite loin , alors que s'il est informé, il peut choisir d'être opéré en ambulatoire en s'arrangeant pour être hébergé la veille au soir à proximité.

Tous les intervenants ont par ailleurs souligné le fait que globalement les patients ne sont "pas réticents" à la chirurgie ambulatoire. Celle-ci "dédramatise" le geste chirurgical et permet une réinsertion plus rapide des patients.

La grande majorité des patients acceptent quand cela leur est proposé. Et après l'intervention, les taux de satisfaction des patients vis-à-vis de la façon dont cela s'est passé sont supérieurs à 90%.